AVOIR UN BON SETTER AU BOIS ET À LA BÉCASSE EN PARTICULIER

Avoir un bon setter au bois fait partie bien sûr des aspirations premières de chaque bécassier qui utilise ce type de chiens.

Bien que je reste persuadé qu’il n’existe pas de lignée bécassière en tant que telle, c’est-à-dire qui soit créancée par nature sur ce gibier. Il existe des lignées, qui de par leur morphologie et leur avidité ont plus de facilité à évoluer dans certains biotopes que dans d’autres. Les setters ne font pas exception à la règle, je dirais même que c’est dans ces races que l’on trouve le plus de chiens aptes à évoluer en milieu couvert. Le choix de l’acquéreur devra donc directement se fixer sur des géniteurs à la morphologie assez solide et qui ont fait leurs preuves au bois.

Ici la résistance, le courage et l’esprit de trouveur seront toujours déterminants.

<>La suite des événements appartiendra bien sûr au maître et à sa façon de conditionner son élève. Le jeune chien devra être sorti très rapidement dans le biotope qui sera le théâtre de ses futurs exploits, en commençant dans un milieu peu hostile, pour aller progressivement vers les parties les plus dures. C’est de lui-même que l’élève devra pousser ses investigations, sans que le maître l’oblige de trop. La rencontre d’oiseaux ne pourra que l’inciter à poursuivre et à approfondir ses recherches plus en avant.

De la sorte, il apprendra à différencier les différentes émanations qu’il rencontrera plus tard, mais aussi à acquérir le sens de la place. C’est de lui-même qui devra

se forger ce sens inné qui fera dire de lui plus tard, qu’il trouve des bécasses où d’autres n’auraient même pas penser les chercher.

POUR OU CONTRE L’INTÉRÊT D’UN CHIEN MONITEUR

L’expérience d’un autre chien plus aguerri sera souvent utile, pour déclencher ce sens de la recherche, mais à petite dose, car le remède est parfois plus dangereux que le mal. Susciter l’envie d’aller et montrer l’intérêt de la recherche est important, mais attention à ne pas fabriquer un chien qui ne marche qu’avec un autre devant, qui calque sa quête sur la sienne, qui se contente de patronner et ne prend aucune initiative. Un bon chien bécassier se fabrique seul au fruit de sa propre expérience et du nombre de rencontres qu’il fera.

DEUX QUALITÉS ESSENTIELLES LE CONTACT ET L’ARRÊT FERME

Une fois que votre jeune chien aura acquis l’entreprise et l’indépendance, il vous faudra travailler le contact. Sans cette qualité première il n’y a pas de chasse possible au bois. Par contact, nous n’entendons pas que le chien se contente de revenir au rappel et mène ses recherches seul devant. Il est important qu’il soit capable de réguler l’amplitude et la profondeur de sa quête en fonction de la topographie du terrain et de la densité du couvert. Un chien au contact, c’est un sujet qui ne dépasse jamais la limite de cloche, qu’il faudra bien sûr adapter à son tempérament et qui repasse régulièrement devant le chasseur pour jeter un oeil, réorienter sa quête et s’assurer du bon travail de l’équipe maître chien. Un chien hors de la main, même s’il est très chasseur est difficilement utilisable et cause trop d’inquiétudes à son maître. Cette notion de contact doit être inculquée très jeune par des rappels judicieux, afin de contenir les éventuels débordements et pour ne devenir à la longue qu’une réelle complicité.

C’est en changeant souvent d’itinéraire et d’allure au bois que vous apprendrez à votre élève à toujours conserver le contact avec vous. À terme, il devra être capable d’aussi bien vous situer dans le bois à votre pas, que vous le situerez avec sa cloche.

La seconde grande qualité que l’on doit exiger d’un chien bécassier est la fermeté de son arrêt. Sans cela il n’y a pas de chasse possible. Le maître doit avoir une totale confiance en son chien. Il est bien évident que dans les premiers temps votre élève vous fera voler des bécasses. Les sujets qui ont arrêté le premier oiseau qu’ils ont rencontré et qui par la suite ne font pas voler sont excessivement rares, s’ils existent.

Faire voler des oiseaux pour un futur bécassier est souvent une bénédiction, car cette situation lui permettra de poursuivre un peu et de prendre conscience de ses moyens, tout en découvrant le sens de la place. Réprimander votre élève sur ces premières actions manquées ne serait certainement pas la bonne solution. Il faut avant tout susciter chez lui l’envie de trouver, plutôt que la peur de mettre à l’envol. Une fois votre chien revenu de sa poursuite, s’il n’a pas relevé l’oiseau une seconde fois, vous vous contenterez de le calmer sur la place et de le caresser pour l’encourager à arrêter.

Si votre chien a été préalablement parfaitement travaillé en plaine tant en matière de quête que d’arrêt, très rapidement, il reproduira cela bois, dans de bonnes conditions, pour le contact, comme pour verrouiller l’oiseau.

Certains chiens sont parfois plus chauds que d’autres, ils remonteront trop rapidement à la viande. Dans ce cas, il vous faudra vous armer de patience, mais l’arrêt viendra. Avec ce type de sujets, vos satisfactions risquent à terme d’être encore beaucoup plus grandes, car à l’inverse d’autres beaucoup trop prudents, vous pourrez être sûr de leurs arrêts. Ces chiens ne seront jamais des menteurs et iront toujours bloquer l’oiseau, plutôt qu’une place de la nuit.

La notion de sagesse à l’envol et qui plus est au feu ne peut s’envisager qu’après ce travail de base. D’ailleurs de nombreux bécassiers n’attachent que peu d’importance à la sagesse au feu. Le rapport par contre lui sera très utile et devra faire l’objet d’un dressage spécifique. Mais avant tout, le contact et l’arrêt sont essentiels, car sans eux il ne peut être question de rapport.

CHASSER LA BÉCASSE AVEC DES SETTERS

Au-delà des qualités premières qui font d’un chien d’arrêt, un bécassier, ce ne sont que les aptitudes propres aux races qui peuvent guider un choix, sachant qu’un chiot ne naît pas bécassier et que pour le créancer de nombreuses sorties seront nécessaires, assorties bien sûr à un nombre important de rencontres sans lesquelles rien n’est possible. Un chien bécassier plus que tout autre, se fabrique à la main de celui qui l’utilise. Ici tout est affaire de contact et de confiance mutuelle. Je parle bien sûr des chasseurs qui laissent leurs chiens étendre leur quête aussi loin qu’il est possible de l’entendre. Le chien bécassier doit au même titre que son conducteur détecter les endroits susceptibles de recéler des bécasses, en d’autres termes on appelle cela “avoir le sens de la place”.

C’est certainement ce sens de la place et cette passion innée pour la chasse au bois en milieu relativement couvert et fermé, qui fera préférer le ou les setters aux chasseurs désireux d’en découdre avec la dame des bois. Point n’est de supériorité de race, ni de couleur parmi ceux-ci, n’en déplaise aux esprits chagrins, ou aux éminemment supérieurs. Laissons à ceux-ci leurs idées préconçues et gavons nous, lorsque le loisir nous en est donné de la course élégante et féline de l’anglais, de la sûreté des arrêts du Gordon ou de l’autorité et de l’entreprise de l’irlandais.

Je pense que tous les setters ont une propension naturelle pour travailler efficacement au bois. Que la végétation soit claire ou dense, que son contact soit aisé ou plutôt hostile, le setter saura s’immiscer et se faufiler au plus profond des taillis. Quand le loisir lui en sera donné, il saura également montrer l’amplitude de sa quête et la rigueur méthodique de ses recherches.

Les setters, avec un grand “S”, car mon propos englobe les trois races sans distinction de couleur, sont des “Roublards”.  Ils font corps avec le bois et le contact qu’ils peuvent avoir avec leur conducteur est sûrement leur meilleur atout. S’ils mènent leurs recherches, c’est uniquement dans le but de bloquer et de prendre en équipe avec leur maître, l’oiseau qu’ils auront localisé.

PLAIDOYER POUR LE PISTAGE, OU COMMENT RELEVER LES ÉMANATIONS AU SOL

Attitude souvent commune aux trois setters, auxquels il convient de donner le qualificatif de “bécassiers”, la manière d’appréhender une place à bécasse. Même si durant leur quête préalable, leur port de tête a été irréprochable, il n’est rare de les voir à la première rencontre d’émanation, mettre le nez au sol et essayer d’en découdre avec l’écheveau entrelacé, du dédale de pistes qu’a pu faire l’oiseau durant la journée. Cette action bien qu’inesthétique pour beaucoup, est souvent source de joie pour le chasseur de bécasse, car cette attitude trahit de façon presque certaine la présence d’un oiseau. Il n’est pas rare qu’à ce moment le setter lance une oeillade en arrière à son maître pour bien lui signifier sa découverte, comme si le son haché et ralenti de sa cloche n’avait pas suffi à dénoncer la situation.

Maintenant et seulement maintenant va se dérouler la partie de bras de fer entre l’oiseau et le chien. Qu’elle soit selon les dires “soupière ou sorcière”, il lui faudra être bien maligne pour déjouer le travail du setter qui n’en est pas à sa première rencontre et qui après ce pistage savant et noble, bloquera l’oiseau la tête haute, le chanfrein tiré au plus haut vers le cône d’émanation.

Je ne dis pas que ce moment de communion intense qui précède l’arrêt ou l’envol de l’oiseau, la possibilité de tir ou non, soit plus fort avec un setter qu’avec un autre chien, mais il est bien particulier et celui qui ne le connaît pas ne peut d’une part pas en parler, mais aussi, est passé côté d’un grand moment cynophilique et cynégétique, n’en déplaise aux puristes les plus virulents.

TROIS SETTERS, TROIS COMPORTEMENTS DIFFÉRENTS

À qualités égales de prestations et de travail sur cet oiseau, le comportement des trois setters diffère quelque peu. Mon propos n’est pas de démontrer qu’une race est supérieure à une autre dans ce domaine, car il existe de bons chiens dans chacune. Ce ne sont pas les participants aux concours de travail ni les chasseurs de bécasses qui me contrediront.


Le setter anglais, séduit en premier par le plaisir qu’il procure en évoluant de façon facile, en se jouant des obstacles et du relief du terrain. Ce chien très intelligent est facile à manier, il est relativement précoce et d’une grande efficacité. Mais je pense que ce qui peut faire préférer un setter anglais, c’est à coup sûr la certitude de vivre avec lui des moments de très grande émotion cynégétique, car ce grand sportif est aussi un artiste, peut-être quelquefois un peu sensible de nez, mais à la bécasse ce léger défaut est souvent considéré comme une qualité.

 

 

Le setter irlandais, comme j’ai eu le loisir de le voir évoluer à la bécasse est un seigneur. Il domine sûrement en amplitude et en profondeur de quête ses deux cousins, c’est le “feu follet” du bois. Son expression très tendue et son excellent port de tête, lui confèrent une allure légère, souple et autoritaire. Sa science du bois et des oiseaux en font un maître sur gibier naturel et sur la bécasse en particulier. C’est un grand spécialiste aux immenses qualités, qui n’ont d’égal que la magnificence de sa robe.

 

 


Le setter Gordon n’a rien à envier à ses deux cousins. Chasseur dans l’âme, le Gordon est un passionné et s’il pêche le plus souvent c’est par excès. La sûreté de ses arrêts reste son atout majeur, avec sa grande résistance. Ce chien très endurant est plus direct dans ses recherches que ses cousins, il lui arrive parfois de “casser du bois”, mais n’est ce pas là ce qui fait un peu son charme. Chien de bois par excellence, il voue une passion sans mesure pour la bécasse, qu’il sait verrouiller avec une grande efficacité.